Champollion, la pierre de Rosette et la naissance de l'égyptologie

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La pierre de Rosette est le monument le plus célèbre de l’Égypte ancienne par le rôle qu’elle a joué dans l’histoire du déchiffrement des hiéroglyphes. Si Jean-François Champollion (1790-1832), « l’inventeur des hiéroglyphes », ne l’a jamais vue, il en a étudié le texte grâce à des reproductions réalisées lors de l’Expédition de Bonaparte en Égypte.

 

    

 

En effet, suite à la découverte de cette stèle à Rosette, dans le Fort Julien, au Nord de l'Égypte dans le delta du Nil, en 1799, par le lieutenant Bouchard, les savants de l’Expédition d’Égypte œuvrèrent alors à employer différentes techniques pour reprographier l’original avant qu’il ne soit confisqué par les Anglais et rapporté à Londres. Plusieurs reproductions et moulages en ont été réalisés depuis, contribuant ainsi à la diffusion du monument.

 

 

La pierre de Rosette est rédigée en trois écritures : en égyptien hiéroglyphique, en égyptien démotique et en grec. Cette pierre de granit contient la copie d'un décret des prêtres égyptiens en l'honneur de Ptolémée V Épiphane (204-180 av. J.-C.), à l'occasion de l'anniversaire de son couronnement (196 av. J.-C). Lors de sa découverte, les savants versés dans la lecture du grec ancien comprirent aussitôt l’intérêt scientifique du monument : la stèle devait être rédigée dans les trois écritures du pays et chaque écriture traduisait ainsi une version du même texte.

 

                           

 

À côté des hiéroglyphes qui notaient une langue morte, seulement lue par les prêtres égyptiens, et du démotique qui était la langue courante égyptienne, le grec était la langue des dirigeants. Trilingue, la pierre de Rosette est en effet un monument caractéristique d’une période de l’Égypte antique : celle des pharaons grecs qui dirigèrent l’Égypte à la suite de la conquête du pays par Alexandre le Grand (332 av. J.-C.), jusqu’au règne de la Grande Cléopâtre (51-30 av. J.-C).

 

Dès la Renaissance, plusieurs érudits européens entreprirent de déchiffrer les hiéroglyphes dont le sens s'était perdu, suite à la fermeture des temples païens (391-392 apr. J.-C.), dans une Égypte devenue chrétienne. Plusieurs approches furent tentées pour traduire les textes égyptiens. Aux XVIe et XVIIe siècles, certains accordèrent une valeur symboliste aux hiéroglyphes en les réinterprétant de façon fantaisiste. La découverte de la pierre de Rosette créa une rivalité entre savants concernant le déchiffrement des hiéroglyphes.

Champollion fut le premier à en comprendre le système d'écriture. En effet, c'est grâce à une connaissance approfondie des langues et écritures antiques qu'il conclut que tous les hiéroglyphes n’avaient pas vocation à être lus (valeur phonétique), mais qu’une partie aidait à la compréhension du texte grâce au sens véhiculé par leur forme (valeur sémantique). Sa démarche fut ainsi consignée dans la Lettre à Monsieur Dacier, secrétaire perpétuel de l’Académie royale des inscriptions et belles-lettres, en 1822, année qui vit la naissance d’une nouvelle science grâce au déchiffrement désormais possible des textes égyptiens : l’égyptologie.