Le scribe et la place de l'écriture dans la civilisation égyptienne

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Le scribe est une figure centrale de la civilisation égyptienne tant la place de l'écrit est omniprésente sur les monuments et objets anciens de l'Égypte ancienne. Préposé aux écrits administratifs et sacrés, le scribe est souvent représenté assis en tailleur, déroulant un papyrus sur ses genoux dans une attitude studieuse. Ce type de statue fournit la représentation même de l'intellectuel.

Un autre type le montre, dans cette même attitude, associé à Thot, le dieu des écrits et l'inventeur des hiéroglyphes, sous sa forme de babouin. Placé sur un autel surmontant le scribe, il veille sur son travail et le protège.

 

 

L'élément le plus représentatif de la fonction de scribe est la palette d'écriture. Le hiéroglyphe désignant le « scribe », littéralement « celui qui écrit, l'écrivain », représente l'ensemble du matériel d'écriture : une palette avec deux godets d'encres noire et rouge, un godet à eau pour les délayer et un jonc qui sert à tracer les signes sur les feuillets de papyrus.

 

 

Dans la Satire des métiers, sagesse certainement rédigée au Moyen Empire (2033-1650 av. J.-C.), il est explicitement fait référence au statut privilégié du scribe. Cette sagesse, aussi connue sous le nom de l'Enseignement de Khéty, met en scène un père s'adressant à son fils : « Vois-tu, il n'y a pas de métier qui soit exempt d'un chef, sauf celui de scribe, car le scribe est son propre chef. Si donc tu sais écrire, tout ira très bien pour toi ; il ne doit pas y avoir d'autres métiers à tes yeux ». Ce statut particulier soustrait le scribe aux travaux manuels et à la pénibilité des autres métiers.

Seule une infime partie de la population est lettrée. L'acquisition de la lecture et de l'écriture nécessite de longues études. Des fouilles archéologiques ont notamment permis de mettre au jour des ostraca (un ostracon est un tesson de poterie ou un fragment en calcaire) qui servaient de supports à des exercices scolaires.

Dans les maquettes en bois ou les représentations dans les tombeaux, on peut voir le scribe en activité, attelé à des tâches administratives : il est par exemple en train de consigner sur papyrus le bétail recensé ou encore les quantités de blé déposées dans les greniers. Le scribe a également un rôle important dans le domaine judiciaire, comme le rappelle la Satire des métiers : « Vois, aucun scribe ne manque de nourriture, ni de biens appartenant au Palais royal. La place assignée au scribe le met en tête du tribunal ».

 

 

Les grands sanctuaires de l'Égypte ancienne sont dotés d'un Per-ânkh, que l'on traduit littéralement par « Maison de vie » : il joue le rôle d'un centre de documentation où les scribes œuvrent à la gestion administrative du temple mais aussi à la vie religieuse en recopiant rituels, textes sacrés et documentaires qu'ils inscrivent sur des papyrus. Certains textes destinés à être affichés dans le temple sont ensuite gravés ou peints sur la pierre par des artisans.

 

Focus sur une œuvre : une palette de scribe et son calame

 

Au sein de son exposition sur l’Égypte ancienne, et dans sa partie consacrée à la thématique du scribe et de l’écriture, le musée Médard présente une palette de scribe du musée d’archéologie méditerranéenne de Marseille et son calame (inv. 477), pour illustrer le matériel d’écriture emblématique de cette civilisation.

Cette palette en bois présente une forme rectangulaire allongée qui est sa forme classique depuis l’Ancien Empire (vers 2700-2200 av. J.-C.). Un renfoncement en forme de cartouche, ce signe qui représente le périmètre du monde dans lequel on trouve habituellement le nom du Pharaon, était probablement destinée à recevoir un double godet, doté chacun d’une pastille d’encre compacte : l’encre noire servait à écrire les différents textes tandis que l’encre rouge était utilisée pour les rubriques et les passages importants.

Les joncs dont une extrémité était défibrée, souvent en la mâchant, étaient plongés dans de l’eau contenue dans un godet spécifique et appliqués sur la pastille d’encre, pour tracer enfin les signes d’écriture sur du papyrus ou des ostraca (un ostracon est un tesson de poterie ou un fragment de calcaire), ou encore, sur des tablettes en bois ou du tissu.

Le roseau, taillé en biseau, que l’on appelle « calame » n’apparaît qu’à l’époque gréco-romaine. 

En plus de sa fonction d’encrier, un rectangle creusé dans le bois de cette palette révèle une cavité où étaient insérés et rangés les roseaux ou joncs qui servaient de pinceaux, ce qui lui confère ainsi la fonction de « plumier ».

Cette palette est sans écriture mais il en existait également des personnalisées et inscrites au nom de leur propriétaire. Si certaines ont été utilisées dans la vie quotidienne, d’autres étaient des simulacres, souvent en pierre, placées dans les tombes pour servir dans l’au-delà. Des godets à encre votifs (c'est-à-dire qui expriment un vœu), en forme de cartouche, ont également été découverts.