L'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert : un laboratoire du savoir

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Grâce au prêt du Carré d'art de Nîmes, le musée vous invite à une immersion dans l'entreprise majeure et symboliquement la plus importante du XVIIIe siècle : l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert. Au coeur d'un combat culturel qui propose de rassembler et de classer toutes les connaissances, au-delà des idées fausses et des superstitions, l'édition de l'ouvrage connaît plusieurs périodes de crise, de multiples contrefaçons et le poids de la censure. Proposé en souscription et publié de 1751 à 1780, ce Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers est une oeuvre colossale rédigée par 160 contributeurs avec une démarche de vulgarisation pour le lien fort entre texte et image. Elle comporte 35 volumes in-folio, incluant textes, planches, tables et suppléments.

 

Vues de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert (prêts du Carré d'Art de Nîmes)

 

 

Denis DIDEROT
(1713-1784)

Fils d’une famille d’artisans aisés, il naît en 1713 à Langres et fait ses études à Paris. En collaboration avec le mathématicien d’Alembert, il consacre vingt ans de sa vie (1747‑1766) à l’édition de l’Encyclopédie. Les articles qu’il rédige sont souvent menacés par la censure, car il critique l’Église et la monarchie. Il publie aussi des oeuvres très diverses, dont la Lettre sur les aveugles
à l’usage de ceux qui voient, qui entraîne son emprisonnement à Vincennes en 1749. En 1773, il entreprend un voyage en Russie auprès de l’impératrice Catherine II. Il en revient l’année  suivante, fatigué et malade pour achever ses dernières oeuvres.

 

                

 

Jean le Rond d’ALEMBERT
(1717-1783)

Mathématicien, physicien et philosophe des Lumières, il publie en 1743 un Traité de dynamique sur la mécanique rationnelle. Cet ouvrage lui permet de démontrer son théorème connu sous le nom de « principe de d’Alembert ».
En 1746, il participe à l’Encyclopédie aux côtés de Denis Diderot, en rédigeant plus de 1600 articles et des textes tels que le Discours préliminaire et l’Avertissement. Suite à des divergences avec Diderot, il arrête cette collaboration en 1759. En 1754, il entre à l’Académie  française et continue ses travaux scientifiques jusqu’à sa mort, en 1783.

 

 

Portrait de Denis Diderot dans les Œuvres de Diderot, 1821
 
  Portrait de Jean le Rond d'Alembert dans les
Œuvres complètes de Voltaire, 1819-1825

 

En tant qu'accumulation raisonnée du savoir, l'Encyclopédie s'inspire de quelques modèles anglais et suit la mode des dictionnaires et des répertoires ici mis en regard : les dictionnaires de Trévoux, de Moreri et de Bayle (avec une première soumission de la théologie à la philosophie), les atlas, la Description des Arts et Métiers... Sa conception résonne désormais avec des « Lumières » qui ont perdu toute connotation religieuse pour devenir des instruments laïques basés sur l'entendement et l'expérience humains. « Ose savoir ! », telle est la devise des Lumières selon le philosophe Emmanuel Kant, qui reprend une formule du poète latin Horace. Cette partie de l'exposition permet ainsi d'approcher les « monuments » d'un acte pionnier de la société moderne.

 

Dictionnaire universel de Trévoux, 1704
(prêt du Carré d'Art de Nîmes)

Dictionnaire historique et critique, Pierre Bayle, 1697
 

Le grand dictionnaire historique, Louis Moréri, 1674
 

 

Aujourd'hui, l'Édition Numérique Collaborative et CRitique de l'Encyclopédie (ENCCRE) offre un accès à tout son contenu, accompagné des recherches les plus récentes et de différents axes de découverte.

Entreprise d’envergure inédite et monument intellectuel du siècle des Lumières, l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert est une oeuvre militante, mise au service de la propagande philosophique. Son histoire éditoriale (1747-1772), sous les auspices du libraire François Le Breton, est semée d’embûches en raison de la force subversive de l’ouvrage, que tentent de contenir les pouvoirs politique et religieux. Dictionnaire « universel » et « raisonné », l’Encyclopédie, diffusée par souscription, entend brosser « un tableau général des efforts de l’esprit humain dans tous les domaines et dans tous les siècles »  pour un lectorat invité à « penser par lui-même » et s’émanciper des préjugés.

 

Frontispice de l'Encyclopédie (©Bibliothèque Mazarine) Système figuré des connaissances humaines contenu dans l'Encyclopédie

 

 

Un vaste chantier l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert : de textes mais également d'images, avec 11 volumes illustrés par 2579 gravures ! Dans le Prospectus d'introduction, Diderot affirme : « Un coup d'œil sur l'objet ou sur sa représentation en dit plus long qu'une page de discours. »

À ce propos, le prêt exceptionnel de rares dessins préparatoires provenant de la médiathèque d'Arles, nous permet de suivre les étapes de création de cette fabrique de l'image. Datés de 1762 et conçus pour représenter la chasse et la fauconnerie, ils sont signés par Louis-Jacques Goussier,  auteur de plus de 65 articles et de 1300 dessins de planches pour l'Encyclopédie. Diderot s'est inspiré de ce technicien, issu des classes populaires, pour créer le personnage de Gousse dans Jacques le fataliste.

Ce recueil, très fragile, composé de 11 dessins préparatoires (plume, lavis, crayon) de Louis-Jacques Goussier, datés de 1762, et 23 estampes à l'eau-forte et au burin de Robert Bénard datées de 1763, est exposé au musée Médard seulement pour une courte période : du 16 mai au 30 juin 2018.